Dans un discours du 28 juin 2023 à Chicago, Joe Biden désigne les Bidenomics comme “une rupture fondamentale avec la théorie économique classique, celle qui n’a fait qu’affaiblir la classe moyenne américaine depuis des décennies”. Le président américain opte ainsi pour une définition de sa poli- tique économique en opposition à la théorie du ruissellement (trickle-down economics), qui a consisté à “baisser les taxes pour les plus riches et les grandes entreprises” sans bénéficier aux classes populaires.

Pour la gauche européenne, empreinte de nombreuses difficultés dans un contexte politique morose, les mots du président de la première puissance économique mondiale sont comme une source d’espoir. Les nouveautés dans la pensée économique outre-Atlantique ont en effet souvent annoncé des évolutions dans le Vieux continent. La révolution Roosevelt au travers le New Deal, analysée dans un ouvrage éponyme par Georges Boris2, a par exemple inspiré les politiques européennes de l’après Seconde Guerre mondiale. A contrario, la contre-révolution Reagan importée en Europe à partir des années 1980 a ouvert la voie à une parenthèse néolibérale en Europe, que la crise de 2008 n’a pas suffi à fermer.

Reste à savoir, au-delà du discours, si la politique mise en œuvre par Joe Biden constitue une véritable rupture avec la théorie économique classique. Nous montrons à ce titre que les Bidenomics forment une doctrine d’intervention cohérente et d’ensemble qui touche à tous les domaines de la vie économique. Les objectifs de la révolution Biden sont clairs : verdir l’économie, réduire les inégalités sociales, réindustrialiser le pays, et partant, améliorer la qualité de vie et la santé des Américains. La politique de l’administration Biden montre des résultats probants, avec un taux de chômage qui atteint son plus bas niveau depuis 70 ans.

Outre cette cohérence dans les instruments et les objectifs, les Bidenomics s’appuient sur des avancées dans le champ académique, qui reconfigurent le rapport des économistes à de grandes questions telles que l’endettement, la croissance, les inégalités ou la politique industrielle. Ces évolutions théoriques dotent la politique de l’administration Biden d’une base solide qui lui permet de s’inscrire dans le temps long. Ainsi derrière un discours aux accents populistes se cache une littérature économique dense. Des personnalités comme Janet Yellen, actuelle secrétaire au Trésor, qui se situent à la croisée du monde politique et du monde académique, forment la courroie de transmission de la révolution Biden.

Les Bidenomics constituent dans ce contexte un sérieux appui pour renou- veler la doctrine économique de la gauche française et européenne. S’engouffrer dans cette brèche pour porter un agenda transformateur demande néanmoins de s’adapter aux spécificités européennes. Hémisphère gauche formule en ce sens cinq propositions concrètes, applicables à l’échelon français ou européen, afin d’importer la révolution Biden. Certaines sont difficiles à mettre en œuvre car elles demandent des négociations complexes entre États membres, tandis que d’autres propositions peuvent être adoptées de manière unilatérale.

Cependant, l’écosocialisme (selon la formule de Paul Magnette) en France et en Europe ne peut se contenter d’une pâle copie des Bidenomics. Les mesures américaines, malgré leur cohérence d’ensemble, comportent des lacunes en matière de sobriété, de coopération multilatérale ou dans leur rapport au capital. C’est pourquoi nous portons cinq autres propositions visant à dépasser la révolution Biden. Base d’appui nécessaire, la révolution Biden ne saurait constituer l’alpha et l’oméga de l’agenda économique de la gauche européenne.

Retrouvez l’intégralité de notre note « La Révolution Biden : un horizon à dépasser » en cliquant sur le lien suivant : Note Bidenomics en pdf

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