Vers une grande transformation agricole et alimentaire

Hémisphère gauche propose trois réformes à mener d’urgence à l’échelle nationale pour donner une réalité concrète à la transition écologique et solidaire de l’agriculture et de l’alimentation :

  • créer un chèque de lutte contre l’insécurité alimentaire ;
  • réformer le conseil public agricole des chambres d’agriculture pour en faire un relais local de la transition agricole ;
  • instaurer un service national agricole.

 

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Introduction  

La politique agricole française des 30 dernières années a mené à des déséquilibres économiques, environnementaux et sociaux qui deviennent insoutenables

Quel système de production alimentaire souhaitons-nous pour la France en 2050 ?   

Un premier objectif de service à la société : le droit à une alimentation digne

Un deuxième objectif social : améliorer les conditions de vie des agriculteurs

Un troisième objectif environnemental : décarboner l’agriculture et préserver la biodiversité

La transformation écologique de notre système de production alimentaire exige de repenser l’action de l’Etat et le rôle du citoyen 

Garantir le droit à l’Alimentation via la mise en place d’un Chèque de sécurité alimentaire

L’instauration d’un Service National Agricole pour faire de la transition agro-écologique un projet de société

Une réappropriation du conseil public agricole par l’État, pour stimuler la transition agroécologique, aujourd’hui trop lente

 

Introduction

Au cours du XXème siècle, grâce au progrès technologique et en premier lieu à la motorisation des procédés, le secteur de l’agriculture a perdu son rang de premier employeur dans les pays avancés. L’alimentation quant à elle, a été révolutionnée par la standardisation suscitée par la mondialisation, dont témoigne la création des groupes mondiaux de supermarchés et des chaînes internationales de restaurants. Les évolutions à l’œuvre ont été si profondes qu’elles ont installé chez la classe moyenne des pays industrialisés l’idée d’une abondance perpétuelle. Dans ce contexte, notre dépendance inévitable aux évolutions de l’agriculture et de l’alimentation n’est plus forcément appréhendée comme une importance vitale. Pourtant, dans un monde de plus en plus soumis aux aléas du changement climatique et de la dégradation de la biodiversité, l’agriculture et l’alimentation sont amenées à devenir des enjeux politiques de premier plan.

Les orientations politiques choisies dans ces domaines ne doivent pas être une matière réservée aux seuls spécialistes et aux agriculteurs. Elles doivent trouver leur place comme un enjeu de débat public dont tous les citoyens doivent pouvoir s’emparer. Afin de faire vivre le débat public sur ces sujets, nous formulons plusieurs propositions pour une transition agro-écologique.

Au sein de l’Union européenne et particulièrement en France, la Politique agricole commune (PAC) est la principale politique structurante du futur de l’agriculture. On ne peut pas penser une transition agroécologique sans réforme profonde de la PAC.  Même si la PAC alimente un modèle de production de nourritures permettant de fournir une alimentation suffisante, saine et de qualité pour chacune et chacun, elle promeut un modèle économique qui ne permet pas de protéger l’environnement, ni de sécuriser un revenu stable et juste pour l’ensemble des agriculteurs européens.

Alors que le futur règlement européen sur la PAC renforce le principe de subsidiarité, l’État français ne s’est pas saisi de ces nouvelles marges de manœuvre pour engager une véritable transition dans le cadre du Plan stratégique national qui doit être soumis prochainement à la Commission européenne. Notamment, pour mettre en place les éco-régimes, le ministère s’est appuyé sur les propositions du syndicat agricole majoritaire consistant à inclure dans un régime environnemental peu exigeant (certification HVE) la très grande majorité des exploitations françaises. De plus, les aides au maintien de l’agriculture biologique sont supprimées. Le collectif “Pour une autre PAC” a mené un riche travail de propositions au sujet de l’une des principales politiques de l’Union européenne. La présente note se veut complémentaire des travaux qui touchent aux enjeux européens de la politique agricole. Elle détaille trois réformes françaises à mener indépendamment de celles à conduire au niveau européen.

Enfin, la protection et une juste répartition du foncier agricole, sont aussi cruciales pour la souveraineté alimentaire, la lutte contre le changement climatique et le développement rural. On distingue les enjeux de la lutte contre l’artificialisation des sols – environ 55 000 ha par an en France sur les 20 dernières années – et le contrôle du prix des terres agricoles qui s’accroît en France avec de fortes disparités. Il s’agit notamment de continuer à permettre le développement du modèle d’exploitations familiales économiquement viables et l’installation des jeunes agriculteurs. Dans cette note, nous faisons le choix de ne pas formuler de  nouvelles propositions, en faisant référence au travail parlementaire de Dominique Potier et notamment à sa proposition de loi relative aux premières mesures de lutte contre l’accaparement des terres et pour l’installation des jeunes agriculteurs (datée du 23 février 2021). Il propose notamment de créer un contrôle des sociétés de portage foncier et de renforcer les possibilités d’intervention économique des SAFER.

L’objectif de cette note est d’imaginer les clés d’un mode d’organisation collectif qui répond au besoin de “nous nourrir” et compatible avec le développement durable de notre société. Nous proposons un ensemble d’outils permettant au système agricole français d’atteindre certains objectifs – trop souvent mis de côté –  qui nous semblent souhaitables et nécessaires pour garantir un épanouissement possible pour les générations actuelles et futures. Parmi ces outils, nous mettrons en avant trois d’entre eux, ambitieux, réalistes car compatibles avec les modes d’interventions actuels de la puissance publique.  À chaque outil correspond un axe de réforme.

Ces trois outils sont les suivants.

(i) la création d’une garantie alimentaire pour les plus vulnérables : Nous proposons la mise en place d’un Chèque de sécurité alimentaire afin de donner aux ménages des trois premiers déciles de revenus les moyens financiers de se nourrir suffisamment et avec une alimentation saine et de qualité. Ces chèques permettent d’acheter des aliments frais et locaux. Ils correspondent aussi un appui à la sécurisation de nouveaux débouchés pour des agriculteurs ayant des pratiques biologiques ou agro-écologiques. Nous proposons un scénario de financement pour cette mesure. Notre proposition s’accompagne de l’amorce du financement d’un programme d’accompagnement des plus jeunes avec un programme d’éducation alimentaire et des plus précaires via le renforcement des Plans Alimentaires Territoriaux ;

(ii) la mise en place d’un Service national agricole : il permettra aux jeunes de moins de 25 ans de travailler pendant 6 mois aux services d’exploitations agricoles publiques ou privées, selon les règles de rémunération de l’actuel service civique, en échange d’une transition agroécologique de ces exploitations. Les atouts de ce dispositif sont multiples : redonner une marge de temps libre à l’agriculteur par l’absorption de certaines tâches par les volontaires, lutter contre la crise des vocations agricoles, pallier la dévitalisation de la France périphérique rurale, en y implantant une présence de la jeunesse ;

(iii) la réforme du Conseil public pour réaliser la transition agro-écologique : l’État doit se réapproprier le conseil public agricole, aujourd’hui dans le giron des Chambres d’agriculture. Par “réappropriation”, nous n’entendons pas priver les Chambres d’agriculture de la gestion du conseil, mais plutôt resserrer son cadre opérationnel, afin de s’assurer que l’agriculture puisse pleinement jouer son rôle dans un contexte de transition agro-écologique et solidaire. Nous proposons trois actions pour que le conseil public soit un réel levier de transition : (i) la formulation d’un contrat d’objectifs des Chambres d’agriculture qui met l’accent sur la transition agroécologique, contrairement au contrat actuel, qui se concentre sur des objectifs abstraits d’innovation, (ii) la revalorisation des métiers du conseil agricole public et (iii) le renforcement du lien entre le conseil public et le financement de la transition.

Après avoir dressé un bilan rapide des problématiques auxquelles fait face notre système de production (1), la présente note précise les objectifs à atteindre dans le cadre de la grande transformation de notre système de production alimentaire que nous appelons de nos vœux (2). Elle documente les modalités de mise en œuvre des trois réformes qui nous paraissent les plus pertinentes pour mener à bien cette ambition transformatrice (3).

1. La politique agricole française des 30 dernières années a mené à des déséquilibres économiques, environnementaux et sociaux qui deviennent insoutenables

Avant de définir des objectifs pour notre système de production alimentaire et de proposer des solutions pour les atteindre, il est nécessaire de dresser un bilan, un état des lieux du système agricole et alimentaire français.

D’un point de vue social, le métier d’agriculteur est une profession fragilisée au sein de la population : vieillissement et difficultés de renouvellement, temps et rythmes de travail difficiles, revenus moyens insuffisants, retraites faibles, sentiment d’incompréhension vis-à-vis de la population. Il en résulte une faible attractivité du métier d’agriculteur qui est aussi fortement préoccupante en termes de concentration du foncier agricole entraînant un renchérissement des prix d’acquisition et freinant les successions et/ou les reprises d’activité. Ainsi, en 2019, 55 % des agriculteurs avaient 50 ans ou plus, soit 24 points de plus que pour l’ensemble des personnes en emploi (31 %). 13 % des agriculteurs ont 60 ans ou plus, contre 3 % des personnes en emploi.

Bien que les situations soient extrêmement diverses selon les régions, les activités ou les cultures, le métier d’agriculteur n’est pas valorisé financièrement. Les agriculteurs sont ainsi la catégorie socio-professionnelle la plus exposée à la pauvreté en 2015, avec un taux de pauvreté de 24,7%, contre 14,2% pour l’ensemble de la population française. Pire, 20% des agriculteurs touchaient un revenu d’activité nul ou déficitaire en 2017, tandis que 8% touchaient moins de 350€ par mois. Par ailleurs, la retraite moyenne des agriculteurs ayant effectué une carrière complète est de 800€ par mois, selon la Mutuelle Sociale Agricole, contre 1500 € pour l’ensemble des retraités français. Si un grand nombre d’agriculteurs exploitants peuvent compter sur la valorisation de leur capital, ils font face à un flux de revenus insuffisant qui mène trop souvent à des situations de surendettement.

Au niveau national, les inégalités de temps de travail entre les agriculteurs et les personnes en emploi sont criantes et entravent la possibilité pour les agriculteurs de s’engager dans des activités extraprofessionnelles. Ainsi, le temps de travail hebdomadaire moyen des agriculteurs est de 55 heures en 2019, contre 37 heures pour les personnes en emploi, soit un écart de +49%. De même pour le travail le week-end, 88% travaillent le samedi, contre 39% pour les personnes en emploi, et 71% travaillent le dimanche, contre 22% pour les personnes en emploi. Enfin, près des deux-tiers des agriculteurs n’auraient pas pris plus de 3 jours consécutifs de congés par an. Ces indicateurs ne doivent pas cacher que la valeur travail est au centre du système de préférences de la catégorie socio-professionnelle.

En matière environnementale, le secteur agricole représente 19% des émissions de gaz à effet de serre (GES) générées sur le sol français. Ces émissions ont deux origines principales : d’une part, 45% des émissions proviennent du méthane issu de la fermentation entérique des animaux d’élevage et de la transformation des déjections. D’autre part, 41% de ces émissions sont liées au protoxyde d’azote qui est principalement émis par la fertilisation des sols. En dehors de ces émissions directes, il est important de considérer les activités en amont et en aval des productions agricoles. La production des intrants (produits phytosanitaires, fertilisants, semences), la transformation des matières premières agricoles ou encore le transport des produits sont d’importantes sources de gaz à effet de serre associées au secteur alimentaire.

Par ailleurs, le secteur agricole français a un double impact sur les écosystèmes, en France ou à l’étranger. D’une part, de nombreuses pratiques agricoles permettent de stimuler la biodiversité sur notre sol national : les techniques de biocontrôle et de lutte biologique, ou les infrastructures agro-écologiques (haies, arbres, bosquets, etc.) qui favorisent la présence d’êtres vivants variés. D’autre part, le secteur agricole français, et plus largement européen, a un rôle à jouer en adaptant ses importations de matière première, qui peuvent être la source de changement d’affectation des terres qui est la première source de perte de biodiversité selon l’IPBES. Selon le Commission européenne, les pays européens sont ainsi responsables de plus du tiers de la déforestation liée au commerce international de produits agricoles.

D’un point de vue sanitaire, la prévalence de la sous-alimentation dans le monde est toujours importante et augmente depuis 2015 pour atteindre 675 millions de personnes en 2019, après avoir baissé entre 2003 et 2014 (FAO). La faim entraîne de nombreuses complications sur la santé voire la mort (25 000 personnes par jour, ONU). Elle induit des retards de croissance chez l’enfant (1/5 enfants dans le monde, FAO) provoquant des effets irréversibles au développement cognitif, des effets délétères sur l’éducation, le revenu et la productivité à l’âge adulte (Banque mondiale). En France, notre organisation alimentaire est aussi défaillante. Selon le secours catholique,  “jusqu’à 7 millions de personnes auraient eu recours à l’aide alimentaire en 2020, soit près de 10 % de la population française.” alors qu’elle ne concernait que 2,6 millions de personnes en 2009. Le droit à l’alimentation est un des piliers des droits humains reconnus par le droit international. Cependant, ce droit n’a pas de transcription en droit français. L’atelier “Lutte contre la précarité alimentaire” des États Généraux de l’Alimentation, proposait de “passer d’un modèle essentiellement distributif à un modèle prévoyant la coexistence de l’aide alimentaire et de forme d’accès durables à l’alimentation”. Cependant, la loi EGALIM d’octobre 2018 n’a prévu aucun dispositif particulier pour permettre une alimentation digne et de qualité pour tous.

En outre, le surpoids et l’obésité progressent dans l’ensemble des régions du monde. Selon l’OMS, 39% des adultes sont en surpoids et 13% sont obèses. Dans le monde, elle atteint 672 millions de personnes en 2019 (1/8 adultes dans le monde). Elle est supérieure en France où elle touche 17% de la population. L’obésité entraîne de nombreuses complications sur la santé et notamment des maladies non-transmissibles (diabète de type 2, maladies cardiovasculaire) et une moindre résistance aux maladies infectieuses (selon l’Inserm). Ces maladies entraînent le décès de 2,8 millions de personnes dans le monde chaque année. L’évolution des besoins est donc à géométrie variable dans le monde, les pays développés devant par exemple diminuer leur consommation, notamment de produits très transformés.

Enfin, l’impact néfaste de l’utilisation massive de pesticides dans l’agriculture, qui ne baisse pas en France et atteint même un record en 2018, n’est plus à démontrer. Selon l’Inserm les substances pénètrent dans l’organisme selon trois voies : cutanée (notamment en milieu professionnel), digestive et respiratoire. La revue de littérature de l’Inserm met en évidence un fort niveau d’imprégnation dans la population, même s’il existe peu de chiffres pour caractériser l’exposition des populations. Elle est, par exemple, de 1 à 84% pour 44 molécules chez les femmes enceintes en Bretagne. De plus, 90% des hommes adultes en Guadeloupe ont des traces de chlordécone dans leur sang. Aussi, à des niveaux très variables selon les substances, les pesticides perturbent la santé humaine. Selon l’ANSES, l’exposition entraîne un excès de risque pour certains cancers (prostates, sang et cutanés), certaines maladies neurologiques (Parkinson, Alzheimer) ainsi que des troubles de la reproduction et du développement.

2. Quel système de production alimentaire souhaitons-nous pour la France en 2050 ?

Nous souhaitons ici définir un horizon qui s’inscrit dans les trajectoires croissantes de besoins alimentaires mondiaux : nourrir dix milliards d’humain à l’horizon 2050. L’atteinte de cet horizon doit reposer sur un équilibre entre trois piliers : environnemental, social et de service à la société.

À chaque pilier nous associons un objectif lui-même décliné en sous-objectifs.

Un premier objectif, de service à la société, est de nourrir l’ensemble de la population française avec une alimentation suffisante, de qualité et compatible avec un régime équilibré ;

Un deuxième objectif, social, consiste à garantir des conditions de vie, non seulement décentes, mais aussi attractives pour l’ensemble des acteurs de notre système alimentaire ;

Un troisième objectif, environnemental vise à réduire les conséquences environnementales négatives de l’ensemble du système alimentaire, en cohérence avec les engagements pris au sein de l’Accord de Paris (sur le climat) et des recommandations formulées par l’IPBES (sur la biodiversité).

Nous concevons ces objectifs comme des absolus et non comme des moyens, sans compter les co-bénéfices, c’est-à-dire que nous pensons nécessaires à un développement durable et équilibré de notre société. Nous montrerons qu’ils forment un ensemble cohérent et qu’il existe un équilibre sanitaire, environnemental et social grâce auquel nous pouvons les atteindre simultanément.

À l’automne dernier, nous proposions la création d’une Caisse d’amortissement de la dette climatique (CADEC), qui a pour objectif de financer les investissements nécessaires à l’atténuation du changement climatique en France. Nous déclinions d’ores et déjà ces investissements entre différents secteurs économiques en cohérence avec la nécessaire réduction des émissions de gaz à effet. Dans cette note, nous prolongerons le travail effectué pour les secteurs de l’agriculture et de l’alimentation dans un cadre plus large, prenant en compte les dimensions sociales et sanitaires.

Nous détaillons maintenant nos trois objectifs.

2.1 Un premier objectif de service à la société : le droit à une alimentation digne

Le droit à une alimentation suffisante et de qualité permettant d’assurer la santé de chacun est un droit reconnu par la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. La préservation de la santé des populations, un service majeur à la société que doit rendre le système agro-alimentaire, comprend aussi leur protection vis-à-vis des usages agricoles et surtout l’utilisation des produits phytosanitaires. Cette protection concerne notamment les opérateurs et les consommateurs, mais doit aussi prendre en compte les pollutions de l’air, des eaux et des sols induites par l’usage de ces produits chimiques.

Sous-objectif 1 : La droit à une alimentation en quantité suffisante et suffisamment diversifiée

L’enjeu principal de la transformation de nos systèmes agricoles dans un contexte de changement climatique est sa montée en capacité, en cohérence avec le défi démographique à un horizon de 30 ans. Cela implique de donner à chacune et chacun les moyens de sa subsistance quotidienne et donc de satisfaire ses besoins énergétiques. Il s’agit ainsi de réaliser l’objectif de développement durable n°2, l’éradication de la faim, tel qu’adopté à Addis-Abeba en 2015.

L’objectif de bonne nutrition comprend aussi la diversification des régimes alimentaires et la réduction de certaines formes d’alimentation comme les produits transformés. La malnutrition est donc à prendre en compte au même titre que la faim. Sur la base de la prospective Agrimonde-terra (INRA, CIRAD, 2009), cela signifie pour les pays occidentaux de diminuer d’environ de moitié la consommation de viandes (en calories) et d’augmenter celle de fruits, légumes et féculents. Notons que le scénario est compatible avec les objectifs de transition écologique (cycle de matière organique et émissions de GES).En prenant en compte l’ensemble des objectifs, cela induit donc un objectif d’évolution du régime alimentaire et des surfaces cultivables associées.

Sous-objectif 2 : Limiter l’impact des pratiques agricoles sur la santé humaine. 

La préservation de la santé implique aussi la limitation de l’exposition de la population aux produits phytosanitaires. L’exposition peut être directe, dans le cas des opérateurs (fabrication, utilisation), mais aussi indirecte via l’air (NH3, CH4 et NO2 notamment) ou l’alimentation (trace de glyphosate dans les urines par exemple). Pour la définition des « pesticides », la réglementation européenne distingue : les produits phytopharmaceutiques, les biocides, les médicaments et produits à usage humain, et ceux à usage vétérinaire.

L’impact de ces substances, détaillé en première partie, justifie la volonté des pouvoirs publics de réduire l’utilisation de pesticides de 50% à l’horizon 2025 (Plan Ecophyto). Le plan Ecophyto II reprend cet objectif et répond aussi à une obligation européenne fixée par la directive 2009/128/CE instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatibles avec le développement durable.

2.2 Un deuxième objectif social : améliorer les conditions de vie des agriculteurs 

La garantie de conditions de vie et de travail décentes et attractives des agriculteurs répond d’une triple nécessité : (i) de pérennité du système productif national et mondial, (ii) d’acceptabilité des réformes à mener, (iii) l’exigence d’équité sociale. Si les conditions de vie des agriculteurs ont été bouleversées depuis le volontarisme des années 1950 et 1960, elles ne sont pas satisfaisantes pour autant, alors même que les modes de production menacent le climat et la biodiversité des sols.

Il peut s’avérer difficile de mesurer les conditions de vie paysannes en raison de leur caractère partiellement subjectif. Néanmoins, un faisceau d’indices, comme le revenu moyen, le rythme de travail ou la proximité d’une vie sociale, permettent de définir de manière objective des sous-objectifs d’amélioration des conditions de vie et de travail des agriculteurs.

Sous-objectif 1 : Garantir un revenu minimum à chaque acteur de notre système de production agricole, tout au long de sa vie. 

Compte-tenu des différences de revenu observées entre les agriculteurs et le reste de la population française, la garantie d’un revenu minimum pour les agriculteurs nous paraît être un vecteur essentiel pour l’équité sociale. C’est d’autant plus vrai que le métier d’agriculteur s’accompagne d’un temps de travail hebdomadaire beaucoup plus élevé que la moyenne française.

Sous-objectif 2 : Améliorer la santé et les conditions de vie des agriculteurs, notamment en termes de temps de travail.

Cet objectif réellement social – la capacité de chaque agriculteur et de sa famille à s’épanouir dans son milieu – est également un enjeu d’attractivité du métier, notamment dans certaines régions françaises. Il est notamment justifié par l’alinéa 11 du Préambule de la Constitution de 1946.

Les inégalités de temps de travail entre les agriculteurs et les autres travailleurs français jouent sur l’attractivité des métiers agricoles et sur la mise en couple des agriculteurs (majoritairement masculins). Ainsi, le taux de célibat masculin chez les agriculteurs est plus élevé que la moyenne de la population, et tend à augmenter depuis les années 1990.

Ensuite, si le critère de la proximité à une vie sociale est le plus difficile à évaluer, notamment au regard des indicateurs disponibles et du danger d’un prisme urbano-centré, la chute radicale du nombre d’agriculteurs exploitants, divisé par 4 depuis 1982 (de 1,6M à 400 000 en 2019) et des ouvriers agricoles (de 310 000 à 250 000) a joué sur la densité de la vie paysanne. Il y a un lien entre la diminution de la population paysanne, l’isolement des agriculteurs et leur sentiment de solitude au travail, facteur de mal-être.

Enfin, une meilleure protection de la santé des agriculteurs nous semble cruciale. D’une part, de nombreuses alertes remontent sur la santé physique des producteurs, du fait de l’utilisation de produits toxiques pour la santé humaine. Ainsi, si les agriculteurs sont globalement en meilleure santé que le reste de la population, selon une étude de la Mutuelle Sociale Agricole, ils subissent des risques de maladie liées à l’usage de pesticides. D’autre part, la santé mentale des agriculteurs est fortement menacée par un faisceau de facteursendettement, solitude, complexité des relations familiales et des questions d’héritage, course à l’agrandissement, sentiment de perte de liberté d’exploiter, « agribashing » médiatique et diffus. Ainsi, en 2010, le taux de surmortalité par suicide de la population agricole par rapport à la population générale était de 20%. Ces menaces sur l’intégrité physique et mentale des agriculteurs, premiers producteurs en contact avec les produits dangereux et touchés par une surmortalité du suicide, nous amènent à faire de la préservation de leur santé un objectif spécifique, distinct de la préservation de la santé des consommateurs via l’alimentation.

2.3 Un troisième objectif environnemental : décarboner l’agriculture et préserver la biodiversité

Sous-objectif 1 : Respecter les engagement pris lors de la COP 21 (trajectoire de la Stratégie nationale bas-carbone)

L’amélioration de la durabilité des productions agricoles exige la réduction des émissions de GES et mais aussi l’augmentation des puits de carbone. Pour cela, la transition du secteur agricole vers l’adoption généralisée de pratiques agroécologiques apparaît comme un levier majeur. L’agroécologie consiste à concevoir des systèmes de production agricole en s’appuyant sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes sur lesquels ils s’implantent. Son principe est de mettre en place des productions en adéquation avec les caractéristiques écologiques d’un territoire, afin de limiter les pressions sur l’environnement et de préserver les ressources naturelles. La transition du secteur agricole français ne peut se faire sans connaître des changements radicaux dans les pratiques et les modes de culture. Les politiques agricoles ont eu tendance à favoriser la mise en place de pratiques avec un service écosystémique très localisé. Nous pensons qu’il est nécessaire de favoriser des démarches systémiques, globales, au sein de chaque entité de production.Il faudra donc promouvoir dans un premier temps les pratiques agroécologiques, en orientant la recherche publique vers cette démarche et en proposant une stratégie décentralisée de diffusion de l’information. Ensuite, il s’agira de donner les moyens techniques et financiers aux agriculteurs pour y parvenir. La formation et l’expertise technique délivrées à l’échelle territoriale auront une réelle importance afin d’accélérer cette transition. Le levier financier ne devrait plus être considéré par les agriculteurs comme un frein à la transition. L’attribution de subventions en fonction des investissements et des pertes de rendement doit être un catalyseur de la transition agroécologique.

Sous-objectif 2 : Réduire les conséquences de notre système de production et de notre consommation sur la perte de biodiversité. 

Le secteur agricole a également un rôle majeur à jouer dans la préservation de la biodiversité, à une échelle globale et locale. La conservation d’une biodiversité présente de nombreux co-bénéfices pour l’homme : au-delà de nous fournir de la nourriture, de l’eau douce et de l’air pur, des abris et des médicaments, elle atténue les catastrophes naturelles, les parasites et les maladies et contribue à la régulation du climat.

Cette conservation constitue donc pour nous un objectif majeur qui s’inscrit dans le pilier environnemental de notre réflexion.

À l’échelle française, nous pensons que l’objectif « zéro déforestation importée » à horizon 2030 doit constituer une priorité, dans la mesure où cet objectif participe aussi à réduire l’empreinte carbone de notre société. Cet objectif a déjà été formulé par les autorités à travers la Stratégie Nationale de lutte contre la Déforestation Importée. Le défi consiste donc à donner à nos agriculteurs les leviers pour diminuer leur dépendance aux importations de matières premières, notamment dédiées à l’alimentation animale, qui sont motrices de la déforestation.

 

Tableau récapitulatif des objectifs

Pilier Sous-objectifs
1. Service à la société 1.1 Garantir le droit à une alimentation en quantité suffisante et suffisamment diversifiée.
1.2 Mettre en œuvre des pratiques agricoles qui préservent la santé des citoyens.
2. Environnemental (climat et biodiversité) 2.1 Respecter les engagement pris lors de la COP 21 (trajectoire de la Stratégie Nationale Bas-carbone)
2.2 Réduire les conséquences de notre système de production et de notre consommation sur la perte de biodiversité.
3. Social 3.1 Garantir un revenu minimum à chaque acteur de notre système de production agricole, tout au long de sa vie.
3.2  Améliorer la santé et les conditions de vie des agriculteurs, notamment en termes de temps de travail.

III.  La transformation écologique de notre système de production alimentaire exige de repenser l’action de l’État et le rôle du citoyen

A. Garantir le droit à l’alimentation via la mise en place d’un Chèque de sécurité alimentaire

Nous proposons la mise en place d’une garantie alimentaire pour les plus pauvres afin de leur donner les moyens financiers de se nourrir suffisamment et avec une alimentation saine et de qualité. Notre proposition s’accompagne de l’amorce du financement d’un programme d’accompagnement des plus jeunes avec un programme d’éducation alimentaire et des plus précaires via le renforcement des Plans Alimentaires Territoriaux. 

  • Une garantie d’alimentation de qualité pour les plus pauvres et de nouveaux débouchés pour les agriculteurs. 

Pour la transition écologique et solidaire, la réalisation du droit à l’alimentation, c’est-à-dire permettre à l’ensemble des individus de se procurer une alimentation saine et en quantité suffisante, est cruciale. La réalisation de cet objectif suppose que les personnes disposent de moyens financiers nécessaires et d’accompagner les publics précaires pour leur permettre de se nourrir convenablement.

Dans ce contexte, plusieurs organisations proposent de mettre en place une sécurité sociale de l’alimentation. Même si l’idée est intéressante, elle ne semble pas forcément adaptée aux problématiques identifiées : elle couvrirait trop largement les besoins financiers en ayant un caractère universel, tout en enchérissant le coût du travail avec des cotisations supplémentaires. De plus, cette proposition est souvent avancée sans financements associés.

Nous considérons plutôt qu’il est nécessaire de mettre en place rapidement un dispositif pérenne de redistribution de ressources à destination des plus pauvres afin de leur donner les moyens effectifs de se nourrir convenablement. Notre proposition est la distribution de chèques de sécurité alimentaire, sous la forme de tickets restaurants mensuels, forfaitaires en fonction du niveau de revenu et non liés à l’activité professionnelle.

Afin de subvenir aux seuls besoins des plus modestes, nous proposons la distribution financière suivante en ciblant les ménages compris dans les trois premiers déciles de revenus :

  • 100€ par mois pour les ménages du 1er décile ;
  • 60€ par mois pour ceux du 2ème décile ;
  • 50€ par mois pour ceux du 3ème décile.

Nous décidons donc de cibler les personnes qui ne se nourrissent pas assez ou n’ont pas les moyens de bien se nourrir, c’est-à-dire les personnes aux revenus faibles, les étudiants, les familles monoparentales et les personnes ayant recours à l’aide alimentaire chaque mois (10% de la population française en 2020, SCCF). En choisissant cette solution, nous ciblons donc aussi l’ensemble des personnes sous le seuil de pauvreté (9 244 000 en 2019, INSEE), vivant avec moins de 1 102€ par mois par unité de consommation.

Enfin, pour maximiser la qualité de l’alimentation de ces ménages, seuls les produits frais et le moins transformés possibles seront accessibles via les chèques de sécurité alimentaire. L’objectif est aussi que les produits accessibles soient issus de filières qui garantissent une juste rémunération des agriculteurs.

Ainsi, même si ce dispositif ne concerne que 30% des ménages, il aura des bénéfices pour l’ensemble de la société. Cette solution permet d’améliorer la santé des plus démunis qui a un coût pris en charge collectivement.

De plus, cet effort budgétaire de 7,5 Mds €, correspondant à plus de 5% de la consommation alimentaire annuelle, permettra une ouverture de débouchés pour des produits frais et plus locaux. Ainsi, les personnes plus pauvres, dont la propension à consommer est forte, vont disposer de nouvelles ressources à dépenser au profit d’une agriculture écologiquement et socialement plus juste.  Cela entraînera, en effet, une hausse significative de la demande pour des agriculteurs aux pratiques biologiques ou agro-écologiques alors que le marché semble aujourd’hui saturé. Au global, du fait de son schéma de financement et d’utilisation, elle pourrait aussi impliquer une réorientation d’une partie de la demande entre sous-secteurs, des filières élevages et grandes cultures vers la filière maraîchage, peu aidée dans le cadre de la PAC. Enfin, l’obligation de juste rémunération des agriculteurs pour être conventionnés pourra inciter les filières à signer s’engager rapidement dans cette voie. 

  • Description opérationnelle du dispositif de Chèque de sécurité alimentaire.

Le nouveau chèque de sécurité alimentaire est construit sur le modèle des cartes de tickets restaurants existants et permettrait d’acheter, exclusivement dans les commerces alimentaires, des produits frais et de qualité.

Les produits conventionnés devraient obligatoirement respecter plusieurs principes.

Initialement, les produits conventionnés seront ceux des groupes 1 – Aliments non-transformés ou transformés minimalement – et 2 – Ingrédients culinaires transformés – selon la classification NOVA. Cette classification, utilisée en France pour les objectifs de la politique nutritionnelle de santé publique pour 2018-2022, permet d’assigner les produits alimentaires ou les boissons dans quatre groupes, de non-transformés (1) à ultra-transformés (4).

A moyen-terme, les produits devront aussi respecter un critère de juste rémunération des agriculteurs. Pour ce faire, les produits conventionnés devront être issus des filières ayant signé un contrat de juste rémunération prévu par la loi EGALIM.

De plus, par principe l’ensemble des produits issus des points de vente directs à la ferme (vente ou contrats AMAP) ou sur les marchés ouverts seront conventionnés.

La liste des produits conventionnés sera donc évolutive, au minimum chaque année. Un comité de pilotage sera chargé de son édiction et de son évolution. Il sera constitué de représentant des ministères de l’Économie et des Finances (distributeur du chèque), de la Santé, de l’Agriculture et de l’Alimentation ainsi que des représentants des collectivités territoriales (consciente de l’offre territoriale d’alimentation), des consommateurs, des distributeurs et des producteurs (en assurant une représentation syndicale la plus variée possible).

Compte tenu des enjeux liés à la décarbonation de notre agriculture et de la part des émissions de CO2 associée à l’élevage (68 à 75% des émissions agricoles et autour de 10% des émissions totales en France), il a été décidé de ne pas inclure la viande dans le dispositif. En effet, sur la base des travaux prospectifs effectués par l’INRA, les pays Occidentaux doivent diviser par deux leur consommation globale de viande pour atteindre leurs objectifs de réduction d’émissions. Dans un contexte de pression extrême sur les systèmes et compte tenu des risques associés au nouveau régime climatique, il n’apparaissait pas souhaitable que l’État soutienne directement la consommation de viande. Par ailleurs, nous sommes convaincus que les classes populaires qui ont été tant de fois aux avants-postes du changement historique, seront des acteurs déterminants de la lutte contre le réchauffement climatique et que c’est faire une erreur d’analyse que de penser qu’elles ne sont pas en situation de réinterroger leurs pratiques alimentaires à l’aune des défis planétaires qui s’annoncent. Enfin, pour ceux qui le souhaitent, la baisse de la pression sur leurs revenus obtenue grâce à la garantie alimentaire leur permettra, par ailleurs, de consommer de la viande et de meilleure qualité.

  • Financement de la garantie alimentaire. 

Le coût de la mesure est donc le suivant, considérant qu’il y a environ 29 750 000 ménages en France (Insee, 2020). Le calcul des sommes distribuées a été élaboré de manière à faire converger le budget alimentaire des plus pauvres vers celui des classes moyennes dont on fait l’hypothèse qu’elles disposent d’un budget suffisant pour se nourrir convenablement.

Pour le financement des chèques de sécurité alimentaire nous proposons plusieurs mesures fiscales afin d’opérer une redistribution vers les plus pauvres (Scénario 1 sur la figure Nouveau budget alimentaire) :

(i) une taxe de 1,5% sur le chiffre d’affaires des commerces de la grande distribution, secteur dont les profits s’accroissent sur le long terme et qui est responsable d’une partie significative du gaspillage alimentaire. De plus, ces entreprises viennent de profiter d’une baisse d’Impôt sur les Sociétés (IS) de 33, 1/3 % à 25% entre 2018 et 2022. Le produit de cette taxe serait alors encore inférieur au gain tiré de la baisse d’IS.

(ii) une taxe additionnelle sur les ventes d’alcools, responsable de plusieurs problèmes de santé publique.

(iii) la suppression partielle de la niche fiscale de TVA visant le secteur de la restauration (hors restauration collective comme les cantines scolaires et d’entreprises), en réduisant la baisse de TVA à 10%.

La suppression partielle de la niche fiscale de TVA sur la restauration se justifie étant donné son inefficacité économique attestée par plusieurs études récentes. Notamment une étude de l’Institut des Politiques publiques (Benzarti et Carloni, 2018) démontre que la réforme a essentiellement profité aux propriétaires des restaurants dont les bénéfices ont augmenté de 24% et qui ont ainsi empoché environ 56% de la baisse de taxe. Ces derniers n’ont donc pas respecté les engagements des Contrats d’avenir. Dans le même temps, les prix ont seulement diminué de 1,9% et les salaires n’ont augmenté que de 4%. Nous espérons donc qu’une légère réduction de la niche fiscale ne soit pas entièrement répercutée sur les prix, même si nous faisons cette hypothèse dans l’évaluation des effets de la réforme.

La redistribution opérée par la création des chèques de sécurité alimentaire et leur financement par de nouvelles mesures fiscales entraîne des conséquences générales sur le budget alimentaire des ménages français. Du fait de la structure de consommation des ménages en fonction de leur revenu, la réforme n’entraîne pas d’effet régressif et la baisse de pouvoir d’achat pour l’ensemble des ménages dont les revenus sont au-dessus du 3ème décile reste limitée. Nous nous appuyons pour l’ensemble de nos calculs sur le budget alimentaire des ménages selon le revenu publié par l’INSEE chaque année.

Au total, c’est surtout le budget alimentaire des plus pauvres qui augmente quand celui des autres ménages est peu impacté.

  • Des programmes associés d’éducation alimentaire

Enfin, nous proposons de mettre en place des dispositifs d’accompagnement alimentaire locaux, notamment une éducation alimentaire à l’école, via les Plans alimentaires territoriaux.

En plus des moyens financiers pour les ménages précaires, la mise en place d’un accompagnement pour mieux se nourrir est crucial pour assurer sur le long terme le droit à l’alimentation.

D’une part, l’école, lieu des apprentissages, est en première ligne pour apprendre aux futures générations à se fournir en alimentation de qualité et à cuisiner pour se nourrir convenablement. Nous proposons donc que dans chaque territoire, les collèges puissent mettre en place un cours « d’éducation alimentaire » en troisième et à raison de deux heures toutes les deux semaines. Le reste de l’enveloppe de financement des chèques alimentaires pourra être utilisée pour ce faire (au minimum 70 millions d’euros). Ainsi, chaque génération pourra suivre un enseignement lui permettant d’être outiller pour accéder à une alimentation saine et de qualité.

D’autre part, nous proposons de rendre obligatoire l’accompagnement des publics précaires dans les Plans alimentaires territoriaux en cours d’élaboration dans l’ensemble des intercommunalités de France. Chaque territoire pourra ainsi mettre en place des mesures ad hoc pour répondre aux besoins des publics volontaires pour se former à la saisonnalité des fruits et légumes ou à la cuisine.

B. L’instauration d’un Service national agricole pour faire de la transition agro-écologique un projet de société

Il nous paraît crucial, au regard du diagnostic qui a été présenté, de faire d’une réelle transition agroécologique un projet de société, à travers la mobilisation des finances publiques, des agents publics mais également des forces vives de notre pays. C’est à cette fin que nous proposons le principe du service national agricole, éventuellement rendu obligatoire. Celui-ci permettrait aux jeunes de moins de 25 ans de travailler pendant 6 mois aux services d’exploitations agricoles publiques ou privées, selon les règles de rémunération de l’actuel service civique, en échange d’une transition agroécologique de ces exploitations.

Le principe du service national agricole est simple : il se déroulerait pendant 6 mois dans des exploitations privées, agréées par les services déconcentrés (DRAAF et DRJSCS). Ces exploitations bénéficieraient de cette main d’œuvre peu chère en échange d’une conversion écologique soutenue de leurs pratiques. Nous proposons qu’il soit expérimenté pendant une période de 2 ans puis rendu obligatoire, tout en maintenant le choix avec le service militaire, le service civique ou un service civil qui pourrait être institué par ailleurs.

La solution du service national agricole répond à plusieurs enjeux qui ont été soulevés dans la partie diagnostic :

  • Redonner une marge de temps libre à l’agriculteur par l’absorption de certaines tâches par les volontaires.
  • Financer le surplus de main d’œuvre nécessaire à une transition durable et low-tech des exploitations agricoles françaises, à la condition d’une réelle conversion écologique des exploitations.
  • Pallier le problème de la transmission des terres, en renouant le contact entre les jeunes générations et les agriculteurs en fin de carrière. Cela devrait s’accompagner d’aides à la reprise de terres et d’exploitation.
  • Pallier la dévitalisation de la France périphérique rurale, en y implantant une présence de la jeunesse, et en renouant les liens entre la France rurale et celle France urbaine. Augmenter les investissements dans les territoires ruraux. (2.2)
  • Répondre à la demande sociétale d’un retour à la terre et au terroir et d’une maîtrise du besoin primaire de l’alimentation.

Le Service national agricole est donc pensé comme un outil puissant parmi ceux utiles pour lutter contre la crise des vocations agricoles. En permettant à plusieurs dizaines de milliers de jeunes de découvrir le métiers d’agriculteurs chaque année, il pourrait permettre d’orienter massivement plusieurs milliers de jeunes vers cette filière. Cet aspect est crucial alors que le taux de remplacement des agriculteurs lors des départs en retraite a baissé de 90 à 71% entre 2014 et 2017.

Par ailleurs, le service national agricole permet de répondre à deux autres enjeux politiques qu’il nous paraît opportun de souligner :

  • Permettre une rencontre entre des jeunes de toutes conditions autour d’un projet commun de société, voire de civilisation (la transition écologique).
  • Former des jeunes en rupture scolaire, professionnelle ou sociale, et leur donner des opportunités professionnelles dans le monde agricole.

L’instauration du service national agricole nécessiterait une prise en charge globale des jeunes volontaires, répartie entre les collectivités locales, l’État et les exploitations agricoles selon leurs compétences respectives. Les volontaires seraient logés et nourris dans des centres d’hébergement collectifs (« campus agricoles »), construits ou réhabilités et gérés par les conseils départementaux. Pour ce faire, les conseils départementaux pourraient bénéficier de l’appui de l’Agence nationale des collectivités territoriales. La sécurité du centre relèverait de l’État. Les intercommunalités ou les départements mettraient en place un transport collectif quotidien qui emmènerait les jeunes dans leurs exploitations agricoles respectives.

Durant la journée, les volontaires seraient placés par groupes sous l’autorité de l’agriculteur. Ils bénéficieraient au préalable de journées de sensibilisation et de formation (agriculture, alimentation, durabilité des sols, mécanique etc.). Le logis, couvert et les tenues de travail seraient pris en compte par la puissance publique. Une indemnité, du montant actuel de l’indemnité de service civique, serait versée aux conscrits. Une partie minime (107€, qui existe aujourd’hui pour les associations) resterait à la charge de l’agriculteur. La durée d’un tel dispositif doit être suffisamment longue pour que le temps passé par les agriculteurs à la formation sur le terrain des jeunes soit rentable, auquel cas une telle mesure ne serait pas utilisée par les agriculteurs eux-mêmes.

Une première estimation financière du coût d’une telle mesure a été réalisée, fondée sur l’hypothèse d’un service national agricole d’une durée 6 mois concernant une cohorte de 100 000 jeunes.

  • Un investissement initial de 2,5 Mds €, pris en charge par la CADEC

En investissement, les principales dépenses concernent essentiellement la construction ou la réhabilitation des campus agricoles pour loger et héberger les volontaires, soit 50 000 places nécessaires sur 6 mois. En prenant en compte un coût moyen de revient par m² de 2300 € en moyenne sur le territoire français, et une surface de 20 m² par volontaire (espaces communs compris), on parvient à un investissement global de 2,3 Mds €.

D’autres dépenses initiales sont également à prévoir, comme les tenues de travail (50 M€ pour 100 000 tenues) ou le système d’information RH (50 M€, selon les hypothèses formulées lors de la mise en place du service national universel).

  • Des dépenses de fonctionnement comprises entre 1,2-1,7 Mds€, financés essentiellement par les emplois verts.

Deux gros postes de dépenses doivent être pris en compte en fonctionnement, qui pourraient être pris en charge par la garantie à l’emploi vert, puisqu’ils contribuent directement à l’objectif de transition agroécologique. D’une part, l’indemnité des appelés (et charges sociales) représente 500 M€ par an. D’autre part, les frais d’encadrement de ces jeunes (à la fois dans les campus agricoles et éventuellement dans les exploitations agricoles en soutien aux agriculteurs) pourrait être chiffrée entre 500 M€ et 1 Mds € par an, en première approche. D’autres dépenses doivent être prises en compte, dont le chiffrage reste approximatif, selon des coûts par volontaire : 50 M€ pour les transports, 50 M€ pour les charges administratives, 100 M€ pour les coûts de formation.

Ce coût est très important. Il doit être pensé comme un investissement à impact social et écologique : engager une transition écologique massive du monde agricole, réduire les fractures sociales et culturelles, revitaliser les campagnes, sécuriser une souveraineté alimentaire durable du pays.

Nous tenons à souligner en toute transparence les principales difficultés d’un tel projet. D’une part, certains défis opérationnels se poseraient inévitablement, notamment l’encadrement des jeunes en service agricole. Quid de ceux qui refusent de travailler au bout de quelques jours, ou entraveraient l’entreprise par leur comportement ? Ce projet ne saurait constituer une charge plus qu’un atout pour les agriculteurs, et nécessite une formation préalable et continue des appelés. Par ailleurs, des encadrants mobiles devraient pouvoir intervenir rapidement sur site pour gérer d’éventuelles difficultés. La question du calendrier du service agricole est également un défi, puisque les exploitations agricoles ont besoin de main d’œuvre par périodes. Enfin, la construction/réhabilitation des campus agricoles posera d’amples difficultés financières et opérationnelles. Des solutions alternatives pourraient être imaginées pour l’hébergement, afin de pallier les coûts et de ne pas accélérer l’artificialisation des sols, sans pour autant offrir d’esprit de corps ou de promotion.

D’autre part, des défis juridiques pourraient se poser au regard du droit de l’Union européenne : les appelés pourraient être considérés comme du travail déguisé marchand. Il importe de travailler son acceptabilité par l’UE. L’éligibilité à cette aide dans le cadre de la green box de l’Accord de l’OMC sur l’agriculture (1995) doit être consolidée. Des négociations commerciales et réglementaires avec l’UE devraient être menées dans le cas contraire. Il conviendra cependant de souligner auprès de l’Union européenne la dimension sociale du projet, notamment pour les jeunes sans emploi, sans formation et sans qualification qui sortent chaque année du système scolaire.

Nous avons également souhaité évoquer les conséquences attendues d’un tel dispositif. Au niveau économique, cette main-d’œuvre pourrait être concurrente avec les travailleurs saisonniers. La dépendance de la France à la main-d’œuvre étrangère est néanmoins une faiblesse stratégique, comme l’a souligné la crise du coronavirus et la pénurie de travailleurs lors de la récolte des fruits et légumes de printemps après la fermeture des frontières. Au niveau agricole, le projet bénéficierait surtout aux activités de maraîchage et d’élevage. Un besoin de main d’œuvre non qualifiée en grande culture semble moins net. D’où une possible réorientation structurelle des cultures vers le maraîchage. Cela permettrait de réduire le déficit commercial de la France en fruits et légumes.

C. Une réappropriation du conseil public agricole par l’État, pour stimuler la transition agroécologique, aujourd’hui trop lente

Afin d’atteindre les objectifs décrits dans la partie précédente, l’État doit réunir l’ensemble des outils qui peuvent être utiles. En particulier, nous pensons qu’il doit se réapproprier le conseil public agricole, aujourd’hui dans le giron des Chambres d’agriculture. Par “réappropriation”, nous n’entendons pas priver les Chambres d’agriculture de la gestion du conseil, mais plutôt resserrer son cadre opérationnel, afin de s’assurer que l’agriculture puisse pleinement jouer son rôle dans un contexte de transition écologique et solidaire.

L’adoption de pratiques agroécologiques par les exploitants agricoles français est une condition nécessaire à la réduction de l’impact de notre système alimentaire sur le climat et la biodiversité. D’après le ministère de l’agriculture, “l’agroécologie est une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes. Elle les amplifie tout en visant à diminuer les pressions sur l’environnement (ex : réduire les émissions de gaz à effet de serre, limiter le recours aux produits phytosanitaires) et à préserver les ressources naturelles. Il s’agit d’utiliser au maximum la nature comme facteur de production en maintenant ses capacités de renouvellement. Elle implique le recours à un ensemble de techniques qui considèrent l’exploitation agricole dans son ensemble. C’est grâce à cette approche systémique que les résultats techniques et économiques peuvent être maintenus ou améliorés tout en améliorant les performances environnementales.” Selon nous, c’est cette direction qui doit être privilégiée pour le futur de la production agricole française.

En outre, comme le note le ministère de l’agriculture, “l’agronomie est au centre des systèmes de production agroécologiques. De solides connaissances dans ce domaine sont indispensables, tant pour les agriculteurs que pour leurs conseillers.” Dès lors, il nous paraît essentiel de renforcer et de réorienter le conseil public, dont le réseau des Chambres d’agriculture est aujourd’hui responsable. Les 6150 ingénieurs et techniciens répartis sur l’ensemble du territoire opèrent dans le cadre du contrat d’objectifs et de performance, signé par le Président de l’Assemblée permanente de Chambres d’agriculture et le Ministère de l’agriculture. Afin d’accélérer la transition agroécologique, nous proposons d’adapter le conseil public aux ambitions grâce à trois leviers complémentaires.

  • Formuler un contrat d’objectifs et de performance qui met l’accent sur la transition agroécologique.

En tant que réseau de chambres consulaires, il est essentiel que les chambres d’agriculture conservent un rôle de représentation des acteurs du secteur agricole auprès des pouvoirs publics. Cependant, dans un contexte de transition agroécologique, l’État doit pouvoir disposer de l’outil “conseil public”, aujourd’hui détenu par les Chambres d’agriculture. Selon nous, il n’est pas nécessaire de créer une structure ad hoc responsable du conseil public, mais plutôt de s’assurer que le conseil opéré par les Chambres s’inscrivent bien dans une dynamique de transition. Une grande majorité des actions du troisième contrat d’objectif et de performance des Chambres d’agriculture, en vigueur depuis 2014, consistent à “faire émerger, accompagner, évaluer et diffuser des projets et des innovations” dédiés à des objectifs environnementaux et sociaux. Nous sommes convaincus que le conseil public peut aller au-delà de l’évaluation et de la diffusion en jouant un rôle beaucoup plus actif, notamment en étant couplé à des dispositifs de financement solides. Il n’est plus temps de “faire émerger » les solutions, l’ADEME en recense déjà de très nombreuses. Il convient dorénavant de les mettre en œuvre, c’est-à-dire d’impulser une transition plutôt que “d’accompagner” un système de production dont les pratiques évoluent lentement. Nous proposons ainsi d’inscrire clairement le terme “transition agroécologique” dans l’axe stratégique principal du prochain contrat d’objectifs des Chambres d’agriculture, actuellement en cours de rédaction. Les actions qui découlent de cet axe stratégique doivent aussi s’inscrire dans une rupture avec les pratiques conventionnelles.

En contrepartie, l’État doit garantir un niveau de ressources humaines et matérielles adéquat aux objectifs fixés, ce qui passe d’une part par la revalorisation des métiers du conseil public et d’autre part par le renforcement du lien entre le conseil public et le financement des projets de transition.

  • Revaloriser les métiers du conseil public.

Aujourd’hui, les métiers du conseil public souffrent d’un déficit d’attractivité. D’après l’enquête de sortie de l’école d’agronomie de Paris (AgroParisTech), les élèves qui s’orientent vers les organisations professionnelles agricoles dont font partie les chambres d’agricultures sont rémunérés en moyenne à hauteur de 28 729 € brut par an. Leurs camarades qui s’orientent vers l’industrie agroalimentaire ou vers l’industrie pharmaceutique et cosmétique sont quant à eux rémunérés à hauteur de 38 808 € et 42 257 €, en moyenne. Le renforcement du conseil public passe donc non seulement par une augmentation des effectifs qui permet de conseiller un plus grand nombre d’exploitations mais aussi par une revalorisation salariale qui permet de garantir un haut niveau de compétence des agents en matière agronomique.

Nous estimons que l’alignement des salaires des 6150 ingénieurs et techniciens sur le salaire moyen lié à leur niveau de qualification a un coût annuel de 100 millions d’euros. Afin d’appuyer les équipes déjà présentes, nous proposons d’ouvrir de nouveaux postes, à hauteur de 10 ingénieurs et techniciens par département, pour un coût d’environ 50 millions d’euros par an.

Les équipes auront pour objectif de réaliser un diagnostic environnemental et économique des exploitations établies depuis moins de 5 ans. Les autres exploitations pourront faire la demande de ce diagnostic. L’objectif de ce diagnostic est d’identifier le maximum d’opportunités de transformations agro-écologiques.

  • Renforcer le lien entre le conseil public et le financement de la transition écologique et sociale de l’agriculture. 

Afin que le conseil public soit un levier réel, nous pensons qu’il doit être couplé à un système de financement, de tel sorte qu’un diagnostic réalisé dans le cadre du conseil technique soit systématiquement assorti d’une proposition de financement, à chaque fois que celle-ci est jugée nécessaire. L’adoption de pratiques agroécologiques peut avoir un coût, qui ne doit pas peser sur l’agriculteur au vu des co bénéfices pour l’ensemble de la société. Dans le cadre de la PAC, l’État doit contribuer financièrement au “développement rural” de son territoire (second pilier de la PAC). Ce développement comprend en réalité toutes les mesures de financement de la modernisation ou de l’installation des exploitations, les aides à l’agriculture biologique, ou aux mesures agro-environnementales.

À l’échelle de chaque région, nous proposons la création d’un comité de pilotage de la transition agroécologique, composé de représentants des Chambres régionales d’agriculture, des élus régionaux, et de l’État en tant que responsable des aides dédiées au développement rural. Ce comité a pour objectif de définir une vision stratégique de l’action de terrain des conseillers agricoles afin de la mettre en adéquation avec les marges de financement de l’État.

Entre 2015 et 2018, l’État a cofinancé 300 millions d’euros pour les mesures agro-environnementales et climatiques en plus des financements européen, dans le cadre du second pilier de la PAC. Il est difficile d’estimer un montant précis nécessaire à la satisfaction des opportunités de transition. Cependant, nous sommes convaincus que l’ordre de grandeur des montants financés par l’État en faveur de la transition agroécologique n’est pas adéquat. Suite au diagnostic proposé précédemment, nous proposons de mettre la CADEC à contribution à hauteur d’un milliard d’euros par an dans un premier temps, pour l’investissement. Dans un second temps, une montée en charge sera nécessaire pour assurer les nouveaux investissements ainsi qu’un maintien des activités agro-écologiques.

Enfin, en plus des pratiques agro-écologiques, il nous paraît crucial que la pleine réalisation des objectifs du plan Ecophyto II+ (réduction de 50% des intrants à horizon 2030) soit une cible spécifique des aménagements et investissements conseillés. Des actions visant la réduction des intrants chimiques et le développement du biocontrôle seront ainsi prioritaires voire même rendues obligatoires après chaque diagnostic. Le biocontrôle correspond aux méthodes de protection des végétaux basé sur l’utilisation de mécanismes naturels (macro ou micro-organismes, médiateurs chimiques comme les phéromones, les kairomones et des substances naturelles). Cette proposition viendra accroître la demande pour les produits de biocontrôle (au sens de l’article L. 253-6 du code rural et de la pêche) ce qui permettra de sécuriser des débouchés de la filière et d’amplifier la recherche et le développement dans ce secteur.

De même, l’amélioration des conditions de vie et la protection de la santé des agriculteurs devraient obligatoirement être prises en compte dans chaque diagnostic. D’une part, l’impact des techniques agricoles utilisées sur la santé physique des agriculteurs et la protection de ces derniers lors d’usages de substances dangereuses comme les pesticides devront faire l’objet d’une analyse. Suivant les résultats, les financements dédiés à la transition écologique et sociale pourront être mobilisés pour l’achat de matériel permettant de faciliter l’activité des agriculteurs ou des équipements de protection adaptés pour l’utilisation des produits phytosanitaires.

D’autre part, l’analyse des conditions de vie des agriculteurs, notamment en termes de temps de travail et donc de repos (hebdomadaires et annuels) sera aussi primordiale lors des diagnostics. Cette dimension est importante pour l’amélioration de la santé mentale des travailleurs agricoles et donc la lutte contre le suicide. Pour inciter ces travailleurs à prendre des congés, nous proposons de réfléchir à l’élaboration de deux dispositifs. D’abord, la création d’une couverture du “risque de remplacement” via la mise en place d’une garantie publique sur les éventuels surcoûts engendrés par un remplacement de mauvaise qualité (dégâts ou pertes éventuelles induites par de mauvaises pratiques). Le financement progressif de congés payés, pour éviter que les agriculteurs prennent des congés payés. Ici, la MSA pourrait préfigurer un dispositif de solidarité entre les agriculteurs les plus riches devant abonder un fonds permettant de financer les coûts de remplacement durant les congés des agriculteurs les plus pauvres.

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