Les Nouveaux défis de la NUPES

Par Nina Karam-Leder

« Première fois dans l’histoire de la Ve », « fait inédit », « parlement ingérable », le 2nd tour des élections législatives a été largement commenté. La douche froide de l’entrée au Parlement de 89 députés du Rassemblement national n’a permis à personne de revendiquer la victoire. Concernant la gauche, les débats tournent déjà autour de la pérennité et de la viabilité de la NUPES, alliance inimaginable pour nombre de personnes il y a quelques semaines encore. L’essentiel est de continuer à faire front commun. Cependant, l’union fait face à une adversité à laquelle elle sera souvent confrontée. Elle risque de décevoir, aussi vite qu’elle l’a suscité, l’enthousiasme des personnes qui l’appelaient de leurs vœux de longue date si elle ne relève pas au moins deux défis.

D’abord – que ce soit autour d’un groupe unique comme proposé par Jean-Luc Mélenchon ou de plusieurs réunis par un intergroupe comme convenu par toutes les forces qui la composent – la NUPES doit rapidement se structurer à l’intérieur et à l’extérieur de l’Assemblée comme une alternative innovante à vocation majoritaire. Les débats qui l’animent doivent pouvoir être tranchés par des mécanismes de démocratie interne qui permettront aux diverses lignes d’exister et aux électeurs de se sentir représentés dans le cadre de l’accord profondément travaillé et qui a abouti à 650 mesures communes. Le combat à l’Assemblée des 138 députés de la NUPES sera particulièrement important dans un hémicycle aussi divers et face au plus grand groupe d’extrême-droite de l’histoire de la Ve République. Or, pour le mener, les querelles d’appareils et de structures devront être résolues, ce qui ne pourra se faire qu’à condition qu’une véritable culture démocratique irrigue cette union. Le Parlement de la NUPES, qui est un des éléments de cette union, devra dès lors, lui aussi, se doter d’une structure permettant de débattre, de se former et d’investir le terrain, en respectant les structures et partis qui la composent.

La consolidation de la NUPES dépendra de la capacité de la gauche à relever un deuxième objectif central : aller chercher ceux que l’on n’entend pas. Avec 53,77% d’abstention au second tour des élections législatives, le signal est clair : il convient d’aller chercher tous ces gens qui, dans un pays éminemment politique, se détournent des urnes. Si la reconnaissance du vote blanc, le vote obligatoire, la mise en place d’autres modes de scrutins et bien d’autres mécanismes électoraux peuvent être débattus et défendus, il est de la responsabilité de la gauche, en particulier de la NUPES et notamment en dehors du Parlement, de repolitiser les débats et les sujets de société et de porter les voix de ceux que l’on n’entend plus. À peine les premières estimations annoncées, les rumeurs de dissolution bruissaient déjà. Mais cette dissolution n’apportera que davantage d’élus d’extrême-droite si l’abstention, seule vraie gagnante de ce scrutin, n’est pas profondément combattue dès maintenant. Comme de nombreux sondeurs et analystes politiques l’ont parfaitement montré, le score de la NUPES aurait été profondément différent si les jeunes s’étaient rendus aux urnes, puisque 71% des 18-24 ans et 66% des 25-34 ans n’ont pas voté, eux qui soutiennent les idées de cette alliance à près de 50% pour les 18-24 ans (d’après Cluster 17). Sans cet effort de repolitisation, nous serons sans cesse contraints de commenter, impuissants et effarés, l’extrême-droite de plus en plus nombreuse à chaque élection et de déplorer l’incapacité que nous avons à retrouver une majorité suffisante pour réellement changer la vie des gens.

2 réponses sur “Les Nouveaux défis de la NUPES

  1. Une situation début de 21ème siècle , demandant la reconnexion de tout le monde. Petite Poucette nous aidera t-elle ?

  2. Ce sera dur et compliqué de dépasser les 4 appareils composant la Nupes (qui ont chacun histoire, habitudes et intérêts) et de faire de rassemblement un espace fonctionnel et démocratique de dépassement. 2 partis semblent particulièrement opposés à se fondre dans autre chose qu’eux-mêmes, alors pourtant qu’ils sont hétérogènes et minoritaires : le Pcf, figé sur ses traditions et ses positions locales, et Eelv, qui est dans une posture «remplaciste», persuadée qu’elle est seule elle-même l’avenir et pas les autres courants de gauche. Pour les 2 autres, Lfi et Ps, c’est peut-être moins figé, leurs intérêts pouvant converger pour compenser la faiblesse territoriale de l’une et la faiblesse nationale de l’autre.

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